Notes de lecture. Xavier Gélinas et Lucia Ferretti, dir., Duplessis, son milieu, son époque

Mise en ligne de La rédaction, le 21 janvier 2012.

Xavier Gélinas et Lucia Ferretti, dir., Duplessis, son milieu, son époque, Québec, Septentrion, 2011

Par Jean Gould

[ EXTRAITS DU NUMÉRO 34 / HIVER 2011-2012 ]

Maurice Duplessis

Ce gros livre de plus de cinq cents pages est le fruit d’un colloque tenu à Trois-Rivières et à l’Assemblée nationale à l’occasion du cinquantième anniversaire de la mort du premier ministre Maurice Duplessis, le 7 septembre 1959. Il regroupe plus de vingt conférences, d’historiens pour la plupart, et trois témoignages d’acteurs de l’époque.

L’éditeur, Denis Vaugeois, qui fut député-ministre du Parti québécois dans le comté de Laviolette à la fin des années 1970, nous gratifie d’une belle préface, ce qui ne manque pas de piquant. L’ouvrage exprime les vues de la nouvelle génération d’historiens du politique, critique de l’historiographie dominante qui présentait le régime Duplessis comme celui de la « Grande noirceur », mais aussi de l’interprétation dite « révisionniste », qui se focalise sur l’histoire économique et sociale. Cette perspective voudrait fédérer les différentes contributions. Les analyses proposées dans les dix sections du livre ne sont cependant pas d’un seul tenant, loin de là. J’y distingue quatre orientations principales.

L’introduction de Xavier Gélinas se présente comme un manifeste de la nouvelle histoire des idées à la sensibilité conservatrice. Étudier Duplessis, l’homme, son milieu et son époque, c’est prendre acte d’un objet trop longtemps écarté des préoccupations des historiens et d’une sensibilité qui n’a pas eu droit de cité dans le milieu intellectuel et universitaire – mais aussi politique – depuis 1960. Retour à la normale après cinquante années de vaches maigres, avec une histoire des idées campée à droite.

Paradoxalement, plusieurs textes revisitent la période 1945-1960 en vue d’y découvrir l’expression d’une modernité qui n’appartenait, jusqu’à maintenant, qu’à la Révolution tranquille. Ainsi s’effectue un déplacement de l’ère du progrès et de la modernisation vers les années 1940 et 1950. L’article de Stéphane Savard se consacre à la construction de la centrale hydro-électrique de Bersimis, sur la Côte nord, par Hydro-Québec. Pierre-Louis Lapointe traite de l’électrification rurale par les coopératives. Marc-André Robert présente ses travaux sur le Service de ciné-photographie provincial. En maints endroits, on fait référence au développement de l’enseignement technique, à la modernisation des campagnes, sans citer de chiffres ou de sources. On revient presque aux conclusions de l’ouvrage de Bourque et Duchastel : restons traditionnels et soyons progressistes. Faut-il cependant rappeler que la maîtrise technique de la nature ou des communications de masse n’est pas nécessairement synonyme de modernité au sens de démocratie, les régimes totalitaires du XXe siècle ayant beaucoup fait pour cette modernité ?

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