De l’islam politique*

Mise en ligne de La rédaction, le 22 mai 2021.

par Marie-Thérèse Urvoy

[EXTRAITS DU NUMÉRO 62/PRINTEMPS-ÉTÉ 2021]

Gustave Doré, L’invocation à Mahomet (détail)

Gustave Doré, L’invocation à Mahomet (détail)

I. Aux fondations de l’islam politique : histoire et textes

Dans son histoire, l’islam s’est toujours distingué par le caractère obsessionnel de son rapport au pouvoir. À Médine, dès qu’il le put matériellement, il assuma un lien intime et constitutif entre le religieux et le politique.

C’est sans doute la Charte de Médine, appelée par les Musulmans contemporains constitution, qui est le premier marqueur fondateur de l’islam politique. Mais auparavant, quel était l’impact concret de la nouvelle prédication commencée en 610 à la Mecque ? Le monothéisme prêché par Muhammad était bien une rupture avec le polythéisme ambiant. L’islam ne présentait qu’une différence avec beaucoup de valeurs préislamiques restées inchangées : elle résidait dans plus d’évidence, de simplicité et de forte certitude sous la protection d’un Créateur unique, plus puissant que toutes les autres divinités. Sur le plan éthique, les liens (…) essentiels et innés, qui unissaient les membres d’une même famille, comme dans toute société primitive proche de la nature, ont été repris et amplifiés dans l’islam, sous la seule réserve qu’ils ne s’opposent en rien à la nouvelle prédication. L’événement historique est sans conteste le remplacement du lien tribal et clanique par le seul lien religieux. La fraternité entre tous les Musulmans est la première caractéristique essentielle de la nouvelle religion et d’une nouvelle société. La communauté, sacralisée par Allah dans le Coran, s’approprie spontanément réflexes psychologiques et usages propres aux tribus.
(…)

* Paru initialement dans Osservatorio Internazionale Cardinale Van Thuân sulla dottrina sociale della Chiesa. Bolletino di Dottrina sociale della Chiesa, aprile-giugno 2019, n° 2, anno XV.