Qu’est-ce que le conservatisme?

Mise en ligne de La rédaction, le 20 juillet 2011.

 

Le Canadian Observer

par Richard Bastien

[ EXTRAITS DU NUMÉRO 32 / ÉTÉ 2011 ]

Certains croient que la langue est ce qui divise le plus profondément les Canadiens. D’autres, que ce sont les inégalités économiques, d’autres encore les inéquités entre hommes et femmes. Pourtant, aussi réelles soient-elles, ces divisions sont peu de choses en comparaison de celles qui sont apparues depuis un demi-siècle en matière de morale et de religion.

Au cours des cent cinquante dernières années, les Canadiens ont vécu des tensions et des conflits internes de toutes sortes, mais ils sont restés unis, surtout grâce à leur commune tradition judéo-chrétienne, qui s’est incarnée dans un profond respect de la dignité de la personne et un véritable sens de la justice. La foi chrétienne a longtemps été la « position par défaut » de la société canadienne. Elle a été le fondement de notre unité et nous a permis d’obtenir des succès non négligeables, aussi bien politiques qu’économiques, parmi lesquels la stabilité politique séculaire du Canada, son rôle lors des deux guerres mondiales, sa participation très active aux affaires internationales, sa prospérité économique et sa capacité d’intégration des immigrants.

Tout cela a été possible parce qu’un grand nombre de Canadiens partageait des croyances chrétiennes qui transcendaient leurs différences linguistiques, économiques et politiques. Toutefois, depuis quatre ou cinq décennies, ces croyances s’effritent, à tel point que les Canadiens se définissent davantage par leur conservatisme ou leur libéralisme, ces catégories étant métaphysiques et morales avant tout.

Les notions de conservatisme et de libéralisme sont indépendantes de toute allégeance politique partisane. Elles se rapportent à une vision particulière de l’homme et de son univers. L’une et l’autre s’autoproclament universelles et rationnelles. La ligne de partage entre libéraux et conservateurs repose en dernière analyse sur la façon dont ils se conçoivent en tant qu’être humain. Elle correspond à un schisme philosophique et religieux que l’on retrouve dans la quasi-totalité des pays occidentaux. Aucun pays ne peut aujourd’hui prétendre à une véritable unité culturelle. Ce qui caractérise le mieux l’état actuel de la culture occidentale, c’est sans doute cette opposition fondamentale entre la croyance à l’autonomie complète de la raison, qui constitue l’essence du libéralisme philosophique, et la croyance à une relation symbiotique entre foi et raison, relation qui constitue l’essence du conservatisme.

Ceci dit, il n’est pas nécessaire d’adhérer à un credo religieux pour être conservateur. Dans sa version « pratique » à tout le moins, le conservatisme éclairé se traduit par la reconnaissance d’une loi naturelle fondée en raison.

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