Dossier cinéma. Qu’est-ce que le cinéma?

Mise en ligne de La rédaction, le 20 avril 2011.

par Benoît Patar

[ EXTRAITS DU NUMÉRO 31 / PRINTEMPS 2011 ]

Le cinéma, c’est d’abord une image, mais une image en mouvement, qui participe d’une mise en place, d’une configuration, d’une intervention rétiniennes. D’où l’importance des éclairages, de la prise de vue, de l’angle de vision. Le plan obéit à certaines règles qui en font un dispositif pictural. Car c’est bien de peinture qu’il s’agit, motion picture, comme disent les Américains, à savoir d’une peinture en mouvement. Cette mise en place se fait non seulement dans le mouvement, mais dans la succession. Dans le mouvement, car le cinéma est irréductible à la photo, et réciproquement. La photo, c’est le règne de l’instantané. Où le mouvement, même le geste, est exprimé par l’immobilité, comme dans la peinture. C’est du reste ce qui en fait la magie. Le cinéma ne privilégie pas l’instantané, il représente les choses par leur mobilité propre. Soit l’image bouge, soit les personnes ou les choses représentées se meuvent, soit les deux. Un traveling est impensable en photographie ou en peinture. Pourtant, le cinéma, c’est aussi une certaine façon de photographier les personnes ou les objets. Il n’est pas indifférent de montrer quelqu’un en gros plan ou en plan éloigné, marqué par un éclairage violent ou dans la pénombre. Le cinéaste doit être un photographe accompli dans l’art de disposer son œil, de représenter le représentable. Il est certain qu’aujourd’hui, la plupart des réalisateurs ont perdu le sens de la représentation photographique. Éduqués à l’art du clip et de la steadicam, ils présentent les choses, mais oublient de les représenter, c’est-à-dire de leur donner une configuration et une signification qui les rendent enviables. Il aurait fallu qu’ils eussent fréquenté la peinture, je veux dire la peinture classique et pas seulement Andy Warhol, et réfléchi à la façon de la concevoir. Les effets spéciaux compensent de nos jours les carences de l’œil. D’où la recherche d’innovations, comme, par exemple, la 3D.

Ensuite, le cinéma est un art de la durée dans la discontinuité, comme la musique à laquelle, sur ce point, il s’apparente.

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