Débats et polémiques. Se tirer dans les pattes

Mise en ligne de La rédaction, le 18 mai 2014.

par Christian Monnin

[ EXTRAITS DU NUMÉRO 44 / PRINTEMPS 2014 ]

Le droit animal?

Dans le Devoir de philo [une tribune bimensuelle du Devoir] du 22 février dernier, Renan Larue livre un stupéfiant plaidoyer en faveur de l’animalisme, ce courant qui milite pour la reconnaissance de droits aux animaux. Son texte débute par une évacuation sommaire des principaux arguments qui ont été opposés à cette revendication, avant de se précipiter dans une reductio ad hitlerum à l’envers qui finira, nous le verrons, par se retourner contre son auteur.

Il aurait pourtant valu la peine d’interroger par exemple le bien-fondé de droits accordés sans contrepartie possible de devoirs. Mais le risque était sans doute trop grand de concéder sur ce point une dissymétrie fondamentale entre hommes et animaux. Monsieur Larue préfère donc jeter en bloc le discrédit sur toute réticence à l’animalisme en convoquant au tribunal de sa justice expéditive le benêt Luc Ferry qui, dans plusieurs ouvrages, a souligné la prévenance du national-socialisme envers les animaux pour démoniser leurs défenseurs. De fait, il ne s’agit nullement d’une simple «proclamation» du Führer (comme le prétend monsieur Larue), mais d’au moins un texte législatif (la loi du 24 novembre 1933). Cette question, qui n’est ni anodine ni déplacée, a fait l’objet de débats houleux, parfois embrouillés, que monsieur Larue clarifiera quelque peu, bien malgré lui.

L’important est d’observer qu’il se contente de caricaturer pareilles interrogations pour les rejeter dans l’absurde avec toute objection aux droits des animaux. Et il faut reconnaître qu’il a beau jeu d’opposer à «Ferry et ses confrères» les philosophes du XVIIIe siècle dont ils se réclament. Luc Ferry est typique de ces libéraux qui renâclent devant les conséquences logiques et presque fatales de leurs positions. Monsieur Larue est plus conséquent, à ses dépens… Il communie néanmoins avec eux dans la certitude inébranlable que les Lumières sont l’antidote absolu à tout ce qui touche de près ou de loin au nazisme, alors que la suite de son propos invite, justement, à mettre le nazisme en Lumières!
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