L’œil écoute. La cinémathèque des pédants: À propos du palmarès de Sight and Sound

Mise en ligne de La rédaction, le 17 novembre 2013.

par Benoît Patar

[ EXTRAITS DU NUMÉRO 41 / AUTOMNE 2013 ]

John Wayne

Le nom de cette nouvelle chronique consacrée au cinéma reprend le titre d’un beau recueil de Paul Claudel publié en 1946 dans lequel le vieux poète réunit ses principaux essais sur la peinture. L’oxymore évoque une certaine qualité d’attention, un regard muet, aux aguets, qui, loin de se contenter d’un art saccagé par la facilité et le narcissisme, attend des images en mouvement quelque révélation sur les choses, le monde, l’humain et (pourquoi pas?) l’ineffable.

Comme elle le fait tous les dix ans depuis plus de trente ans, la revue britannique Sight and Sound vient de publier sa liste des cinquante meilleurs films de tous les temps. Avant d’examiner ce palmarès, réfléchissons un instant à ce que signifie cette démarche critique. Tout d’abord, il m’apparaît singulièrement prétentieux d’affirmer que cette liste englobe le cinéma de tous les lieux et de toutes les époques. Comment quelqu’un peut-il déclarer sans rire qu’il a une connaissance suffisante de ce qui s’est produit en matière cinématographique depuis cent ans dans tous les pays du monde? Si l’on procède à une évaluation rapide de la production filmique depuis les origines, on arrive facilement au chiffre d’un million et demi de longs métrages réalisés à ce jour. Qui peut se vanter d’en avoir vu 5%? L’auteur de ces lignes, à l’instar de son ami Jean Mitry, a vu environ vingt-cinq mille films durant sa vie, ce qui représente une moyenne d’un peu plus d’un film par jour, ou de neuf films par semaine, pendant cinquante-cinq ans. C’est beaucoup et c’est peu. Rabaissons donc nos ambitions.
(…)

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