Nicolas de Cues, ancêtre de l’éthique de l’autre*

Mise en ligne de La rédaction, le 9 août 2013.

par Édouard Divry, O.P.

[ EXTRAITS DU NUMÉRO 40 / ÉTÉ 2013 ]

Nicolas de Cues

En ce début de vingt-et-unième siècle, l’idée «marine» acquise par Nicolas de Cues sur les flots remuants, au retour d’un voyage auprès de Jean VIII Paléologue qui promettait extérieurement l’Union des Grecs avec les Latins sans vraiment y tenir – la coïncidentia oppositorum, la coïncidence des opposés (1437) – connaît un nouvel intérêt. Cette «illumination» avérée ou reconstruite trouvera son accomplissement dans le livre sur la Docte Ignorance (1439), puis dans la défense de celle-ci, De apologia doctæ ignorantiæ (1449). Cette doctrine a provoqué un regain de fascination en nos jours séduits par un devoir de transition entre la pensée classique et le nihilisme postmoderne. Chercher à faire coïncider l’inconciliable, constitue la quadrature du cercle des hommes politiques contemporains. Une recette à bon marché peut tenter bien des partis politiques affrontant le phénomène clé de nos sociétés, celui du pluralisme religieux.

Nicolas de Cues, un théoricien de génie, apparaît lors d’une autre période troublée de l’histoire de l’Église et de l’Europe, au bord de la fracture. Cues, cet évêque du début du quinzième, émerge au milieu de la mêlée de ce qu’il est convenu d’appeler un temps d’épreuve pour l’Église et l’Europe: au sortir de la grande peste si dévastatrice, il y a le grand schisme qui conduisit l’Église à être gouvernée par trois papes concurrents, avec en toile de fond, la terrible guerre de Cent Ans qui opposa Anglais et Français (1337-1475).

Après de nombreuses éclipses, Nicolas, cet homme à la fois intellectuel et actif, recommence à exercer un véritable ascendant intellectuel, même au plan des mathématiques. «Principal héritier de Maître Eckhart, il prolonge le passé par son rattachement au néoplatonisme et annonce les idées nouvelles par ses théories audacieuses.» Présentons-le brièvement, puis observons sa doctrine des religions. Sera-t-elle valable pour affronter un temps difficile comme le nôtre?

* Cet article est paru à l’origine sous le titre «Une récupération moderne de Nicolas de Cues», dans Marie-Thérèse Urvoy et Luc-Thomas Somme, dir., L’Amour du Christ nous presse. Mélanges offerts à Mgr Pierre Debergé, Versailles, Éditions de Paris, 2013, p. 391-407.
(…)

Écrire un commentaire

You must be logged in to post a comment.