Débats et polémiques. Le cire-pompe de la pensée unique (texte intégral)

Mise en ligne de La rédaction, le 22 juillet 2012.

Par Matthieu Lenoir

[ EXTRAITS DU NUMÉRO 36 / ÉTÉ 2012 ]

La Chute

Le 27 avril dernier, un article de Christian Rioux sur Nicolas Sarkozy intitulé « La Chute » participait très logiquement à la mise à mort médiatique de Nicolas Sarkozy dans le journalicule canadien encore appelé Le Devoir. Suant le crétinisme binaire de nos temps digitaux, il est pourtant le fait d’un journaliste québécois en poste à Paris, qui devrait par ses origines et sa culture savoir ignorer cette haine mimétique centrée sur la victime émissaire – en l’occurrence « Sarkozy » – qu’a si bien décrite René Girard en analysant le fonctionnement des sociétés primitives. Or le primitivisme de ce plumitif dépasse l’entendement.

Il nous assène que tout, du déclin moral à l’endettement du pays, serait imputable à Sarko*. Nous allons reprendre un à un ses arguments, qu’il extrait au demeurant de l’ouvrage d’un libéral français déçu du sarkozysme. Parmi les plus venimeux.

Sarkozy a fêté sa victoire au Fouquet’s ? Et pourquoi ne pas parler des repas de François Hollande chez Laurent, où la seule entrée est au prix du repas de la brasserie des Champs-Elysées ? Des hôtels de luxe de Mitterrand en Égypte, de Chirac à l’île Maurice ? Et pourquoi ne pas dire que ce soir-là, Sarkozy n’a quasiment rien mangé au Fouquet’s ? Et que ses amis « milliardaires » ne le sont pas plus que ne l’est Pierre Bergé, empereur de la couture, copropriétaire du Monde, et qui finança les locaux de Ségolène Royal des années durant ?

Sarkozy a dit que l’Africain n’était pas entré dans l’histoire ? C’était pour déplorer que le sous-développement lui interdise de participer aux aspects positifs de la modernité.

Il a dit qu’un instituteur ne pourrait jamais remplacer le curé ou le pasteur ? Le condamner revient donc à affirmer l’inverse et à mettre à nu sa propre apostasie et sa haine de la foi.

Il a donné un rendez-vous galant à Disneyland ? Notre procureur a opportunément oublié les appartements publics que François Mitterrand a scandaleusement fait attribuer à sa maîtresse durant son règne.

Il a affirmé que le chômage pouvait passer sous la barre des 5 % ? C’était avant la crise des subprimes et celle, pire encore, de l’euro. Le taux de chômage en France est resté assez stable pendant quatre années de dévastation financière à un peu plus de 9 %, quand celui de l’Espagne passait de 8 % à 24 %.

Il aurait été une sorte de Berlusconi à la française ? Son patrimoine indique pourtant qu’il n’est propriétaire d’aucun bien immobilier et que ses capitaux, placés en assurance vie, s’élèvent à un montant sans doute inférieur à celui du révolutionnaire haineux Jean-Luc Mélenchon, qui possède un appartement évalué à 1,5 million d’euros à Paris, un domaine en Périgord, un appartement à Deauville… Qu’un prétendu journaliste arrive à comparer le capitaliste milliardaire et libertin Berlusconi qui a bâti un empire télévisuel à partir d’un empire immobilier, à Sarkozy fils d’immigrés et qui a pour seule carrière celle d’avocat et d’élu de la République laisse tout simplement pantois.

Et le rédacteur du Devoir de nous sortir l’histoire récente du « policier qui a abattu un suspect sans raison apparente », ce qui aurait entraîné une surréaction de Nicolas Sarkozy. « Sans raison apparente » : on frise le ridicule, dirait Devos. La victime, en plein vol à main armée, brandissait à l’adresse des policiers, excusez du peu, une fausse grenade à l’apparence d’une vraie, et surtout un vrai calibre, était multirécidiviste et venait de sortir de prison. Même le socialiste Hollande a soutenu les policiers indignés que leur collègue fût mis en examen pour « homicide volontaire».

Quant aux appels musulmans en faveur du socialiste Hollande, l’art de la dissimulation et du mensonge semblent conceptuellement inaccessibles au correspondant du Devoir.

On relèvera pour terminer la sempiternelle mise en cause de complicité avec l’Occupant, la brownienne reductio ad hitlerum, concernant une remarque du président candidat sur le Front national. Oui, « du moment que la République accepte que le Front national présente une candidate, alors cela signifie que ce parti est compatible avec les institutions, sinon il serait interdit », soutient Sarkozy. Que cela déplaise au cire-pompe de la pensée unique ne change rien à rien. On lui conseillera simplement, par souci d’équilibre, de mentionner dans son article les liens de Marine Le Pen avec la gauche. Il y eut Alain Soral. Aujourd’hui, son directeur stratégique de campagne est un ancien bras droit de Jean- Pierre Chevènement, socialiste de gauche en rupture de ban. Et c’est Mitterrand qui, par une cynique réforme du scrutin, ouvrit les portes de l’Assemblée nationale à 32 députés du FN en 1986, pour mieux diviser la droite.

Il conviendrait d’enseigner à certains journalistes du Devoir que l’histoire est toujours un petit peu plus compliquée que ce que leur mentalité petite-bourgeoise voudrait qu’elle soit.

* Accuser « Sarkozy » d’être à l’origine de la dette française relève de l’imposture, quand on connaît le rôle des socialistes dans cette histoire, et celui du gaullo-socialiste Chirac. Surtout si l’on se rappelle que lors de la publication du plan de relance par le gouvernement de Nicolas Sarkozy, qui prévoyait des dépenses ciblées sur la recherche et l’investissement plus que sur la consommation, les socialistes qui aujourd’hui le blâment d’avoir creusé la dette, lui reprochaient alors de ne pas suffisamment dépenser. L’injonction contradictoire mène à la schizophrénie.

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